Des valeurs solides pour faire grandir les nouveaux All Blacks Sevens
La Nouvelle-Zélande a dit au revoir à 251 tournois internationaux, 17 titres en HSBC SVNS, 4 Coupes du Monde, 4 médailles d’or du Commonwealth et 2 médailles d’argent olympique avec la retraite de Tim Mikkelson, Scott Curry et Sam Dickson ce mois-ci.
Ce départ, célébré par un dernier haka qui vibre encore dans leur chair, marque la fin de trois des parcours les plus titrés de l’histoire de cette sélection.
Avec les départs des jeunes Moses Leo, Payton Spencer, Leroy Carter, Che Clark, Tepaea Cook-Savage et Fehi Fineanganofo, un grand changement attend les All Blacks Sevens, qui abordent cette saison après des Jeux Olympiques de Paris 2024 décevants.
Mais, même si Dickson affirme que « tout sera différent sans les trois grands-pères bougons dans l’équipe », le noyau reste solide et de nombreux espoirs sont prêts à éclore.
« Il reste un groupe de 10 ou 12 mecs très expérimentés qui sont encore au sommet de leur carrière. Il s’agit presque d’une tempête parfaite pour Tomasi [Cama] car il va pouvoir s’appuyer sur une solide expérience pour reconstruire et aider ces jeunes à percer.
« Regan Ware, Amanaki Nicole et Aquila Rokolisoa sont forfaits pour Dubaï, ce qui a forcé Tomasi à appeler des jeunes. Un nouveau cycle démarre et il n’y a aucune grosse échéance en vue. C’est le moment parfait pour apporter du changement. »
La dureté de cette longue décennie au sommet a laissé des traces sur le corps de Dickson. Il espérait pouvoir jouer à XV à l’étranger, mais une brève pige à Canterbury, le club de ses débuts, après les JO lui a permis de se rendre compte que son organisme ne pouvait plus reproduire l’intensité physique qui lui a permis de faire une telle carrière.
L’histoire d’un crève-cœur
À cause d’une excroissance au niveau d’un disque intervertébral, il se retrouve parfois avec le bras gauche engourdi s’il reçoit un mauvais choc. Il ne peut donc pas jouer 80 minutes. Le rêve d’un titre olympique lui a permis de tenir sur les dernières saisons de sa carrière mais l’histoire s’est terminée en crève-cœur pour la Nouvelle-Zélande et lui.
« Aux Jeux du Commonwealth, j’ai connu des moments de joie. Mais à chaque fois qu’arrivaient les JO, les choses ne tournaient pas en ma faveur. À trois mois des JO de Rio, je m’étais fait les croisés.
« J’ai eu la chance d’intégrer quand même l’équipe, mais pendant la compétition, je me suis blessé à l’articulation acromio-claviculaire et je me suis ouvert le crâne. En plus, comme vous le savez, on n’a pas gagné, j’étais dégoûté.
« Avant Tokyo, en 2020, année durant laquelle les Jeux devaient se tenir, on était en pleine ascension, on tournait à plein régime au meilleur des moments. Mais à cause du Covid, ça s’est joué en 2021 et on n’a pas su revenir à notre meilleur niveau. Je me suis même déchiré l’ischio avant la compétition.
« En 2023, pareil. On était à un an des JO de Paris et on était en pleine bourre. On a joué sept finales pour cinq victoires. Mais on était prêt un an trop tôt, encore une fois. J’étais capitaine, cette saison-là, mais [le sélectionneur] Clark Laidlaw est parti aux Hurricanes et le nouveau staff avait d’autres idées. Les choses n’ont juste pas fonctionné, même si j’avais la sensation que je pouvais continuer et performer.
« Chapeau à l’Afrique du Sud [qui a éliminé l’équipe masculine de Nouvelle-Zélande lors des JO de Paris]. Notre équipe a perdu trop de ballons. L’Afrique du Sud n’a rien lâché et on s’est fait manger par la pression. C’est un peu comme si on était maudits aux JO. »
Le défi permanent du HSBC SVNS
Durant sa carrière longue d’une douzaine d’années débutée sous le règne doré de Sir Gordon ‘Titch’ Tietjens, Dickson a vu du pays. Pour lui, le HSBC SVNS est plus disputé que jamais.
« Durant les quatre premières années de ma carrière, il y avait toujours au moins un match de poule à chaque tournoi où on passait 40 ou 50 points à l’adversaire. Aujourd’hui, c’est rare.
« Le Canada [relégué l’année dernière] est un excellent exemple. Même s’ils étaient en bas du classement, ils nous ont toujours donné du fil à retordre. En plus, aujourd’hui, il n’y a que 12 équipes. C’est carrément plus dur.
« L’Uruguay et le Kenya font leur retour cette année, ça ne va pas nous faciliter la tâche ! J’ai hâte de voir ce que va donner le Kenya. »
De plus, le rugby à 7 n’a jamais connu autant de joueurs aussi polyvalents.
« Notre sport n’a jamais été aussi physique, aussi létal. Avant, les joueurs n’étaient pas forcément tous au top techniquement, notamment sur le placement du corps ou les grattages. Maintenant, chaque joueur est une menace sur le terrain.
« Dans les airs, les joueurs sont aussi impressionnants. C’était rare de voir des joueurs se saisir du ballon au-dessus de la tête. Aujourd’hui, chaque équipe compte trois ou quatre joueurs qui sont spécialistes de ça.
« Il y a aussi la condition physique. Quand j’ai commencé, c’était là que la différence se faisait, surtout quand on jouait des mi-temps de 10 minutes en phase finale. ‘Titch’ nous en faisait bavait. Depuis que c’est un sport olympique, les équipes se sont professionnalisées sur le plan de la préparation, qu’elle soit physique ou mentale. »
Place à l’avenir
Parmi la nouvelle génération des All Blacks Sevens, qui apprécie-t-il particulièrement, alors ?
« Oli Matthis a 18 ans. Il sort des Hamilton Boys, il va faire sensation. Il a joué pour les New Zealand Schools à 7, mais les Waikato, en NPC, ont connu tellement de blessures qu’ils l’ont fait jouer à l’aile. Il joue flanker mais il est tellement rapide et imprévisible qu’il peut aussi jouer ailier au haut niveau. Je pense qu’à Dubaï, il va enfiler les essais.
« Il y a aussi Joe Taumateine. Lui, c’est un monstre. Il fait 1,93 m, quasiment 110 kg, c’est un vrai athlète. Il est puissant, il joue pilier, j’ai hâte de voir ce qu’il va donner dans le jeu au large, dans les deuxièmes phases, avec de l’espace pour courir ou foncer sur ses adversaires. On va kiffer ! »
Pour la première fois en 12 ans, Dickson ne prépare pas son sac orné d’une fougère argentée. Mais il va chausser les crampons au Sevens Stadium, puis qu’il va coacher les Tropics 7s et tenter de les faire briller lors de l’Open Invitational, l’un des nombreux tournois secondaires qui accompagnent la compétition élite et font de Dubaï une étape si particulière.
« J’ai toujours aimé Dubaï », confie-t-il, lui qui y a fait ses débuts internationaux à 7. « Bien souvent, quand on y allait, c’était sans certains de nos meilleurs joueurs qui s’étaient blessés lors de préparations trop intenses. Mais ce tournoi donne le ton de la saison et j’aime l’ambiance de fête qu’il y règne. Sans parler de l’hôtel et de la nourriture ! »
Il a l’ambition de coacher au niveau international et quand on lui demande qui sont les meilleurs joueurs avec qui il a joué, il hésite longuement avant d’évoquer Cama, l’actuel sélectionneur.
« J’ai joué avec énormément de joueurs qui étaient durs au mail, de vrais guerriers avec une technique de malade. Mais Tomasi, il avait vraiment tout.
« Personne au monde ne lui arrivait à la cheville sur le plan de la compréhension du jeu. Il avait un était d’esprit incroyable, il pouvait répéter les efforts encore et encore, et puis c’était un leader. Il jouait chaque minute de chaque match. Je pourrais citer 15 autres joueurs qui m’ont marqué mais, si je ne dois en garder qu’un, je prends Tomasi. »
Hors terrain, il cite Joe Webber, qui n’est pas le dernier pour s’amuser. Son énergie et sa capacité à unir les hommes est saluée par Dickson, qui y voit une qualité inestimable tellement elle lui a offert de fous rires sur le circuit SVNS.
Heureusement pour la Nouvelle-Zélande, Cama et Webber seront au cœur de la renaissance des All Blacks Sevens.
Le bleu de l’Argentine et de la France étaient les couleurs à la mode, la saison dernière. Mais l’histoire du SVNS a prouvé que le noir ne reste jamais loin des tendances. Si Dickson, Mikkelson et Curry ont pris leur retraite, leur héritage restera à jamais tissé sur le maillot des All Blacks Sevens, à commencer par celui qui sera donné aux joueurs à Dubaï, pour la première étape de la saison.