Comment la grande fête de Dubaï prend-elle forme ?
Mat Tait, manager général de l’Emirates Dubai 7s et ex-international anglais, connait son rôle mieux que quiconque.
Retraité depuis 5 ans, il comprend parfaitement le rugby : « Je ne suis pas resté loin du rugby très longtemps. J’en comprends l’écosystème, je sais ce que veulent les joueurs quand ils débarquent ici, tant sur le terrain qu’en dehors. »
Durant sa carrière, il a joué à VII et à XV. À XV, il a débuté en Premiership et en sélection en 2004, à 18 ans. Il était de la finale de Coupe du Monde en 2007.
Beaucoup se souviennent de lui sous le maillot des Leicester Tigers, avec qui il a disputé 143 matchs en Premiership. Mais, en 15 ans de carrière, il a également brillé avec England Sevens, avec qui il a décroché une médaille d’argent lors des Jeux du Commonwealth 2006 en Australie.
Mais l’étape de Dubaï est plus qu’une simple épreuve de rugby à 7. « Ma femme dit tout le temps qu’elle était fun avant de se marier avec moi », plaisante Tait. « C’est un joli de pied de nez pour moi d’organiser une immense fête comme celle-là. »
Immense, c’est le mot. On estime à 80 000 le nombre de visiteurs qui passeront les portiques du Sevens Stadium en plein milieu du désert ce week-end.
Si le jeu au pied de Tait est plus approprié sur le terrain que sur le dancefloor, il sait qui contacter pour organiser la plus grande fête de l’année.
Il a fait appel à Stormzy, l’un des musiciens britanniques les plus populaires du monde, pour ambiancer cette édition. La musique sera également assurée par de grands noms comme les Sugababes ou Artful Dodger.
Plus que sur n’importe quelle autre étape du HSBC SVNS, l’ambiance à Dubaï est incroyable.
La musique ne fait pas tout. L’étape de Dubaï est également le théâtre de divers tournois amateurs et vétérans. Il y a aussi du netball, du cricket et du padel – pour lequel un court permanent sera installé.
Les sportifs pourront aussi transpirer lors de l’événement de CrossFit WODon3 puis profiter de la nourriture et des boissons à disposition.
La fête risque d’être épique, mais vous n’aurez que peu de chances de voir Tait trainer par là. Vous ne risquez d’ailleurs pas de le voir du week-end, car il a choisi de faire quelque chose qui lui ressemble beaucoup, à savoir organiser une fête incroyable tout en restant super discret.
La première fois que je l’ai rencontré dans ses nouvelles fonctions, il portait un pantalon chino, une chemise et une veste – une tenue des plus réglementaires, car Tait ne plaisante pas avec les règles.
Il adore cet aspect invisible de son métier. « J’aime les chiffres et j’ai le souci du détail. »
C’est cette minutie qui fait de lui l’homme parfait pour ce rôle d’organisateur.
Quand on lui demande pourquoi Dubaï ressemble tant à un festival, il répond : « Pour moi, c’est obligé. On doit attirer de nouvelles personnes vers le 7. Il faut donc leur donner envie de venir sur ces événements. »
Dubaï compte aujourd’hui deux fois plus de visiteurs qu’à ses débuts. L’étape est si populaire qu’elle ne mentionne plus le mot « rugby » dans son nom depuis 2021, comme un symbole du développement rapide et changeant de la démographie de la ville. Il fallait aussi créer un produit vendeur et unique au sein d’une saison chargée.
Tait aime toujours autant le rugby, cependant, et il connait bien l’histoire de cette étape. « On est fier que le rugby reste au cœur de cet événement, car c’est grâce à cela qu’il existe. »
Afin de perpétuer cet héritage, les équipes invitées qui reviennent pour jouer seront inscrites sur un Wall of Fame cette année. Leur nombre de participations sera également inscrit.
Il s’agira, pour Tait, de son deuxième Dubaï à la tête des opérations. Il a pris ses fonctions en novembre 2022, mais à seulement quelques semaines de l’étape cette année-là. « J’ai beaucoup de responsabilités à assumer. Cette étape est le joyau de la saison. Il faut résister à la pression. »
Ce n’est pas la pression de ses 38 sélections avec l’Angleterre qui lui a servi de préparation, mais plus son métier de conseiller sportif. « J’ai fait du conseil pendant trois ans, ça m’a permis d’apprendre les bases de ce métier. »
Mais ce que Tait aime plus que tout, c’est faire partie d’une équipe qui travaille dans l’ombre. « C’est certainement ce qui me rapproche le plus des terrains. Mettre les bonnes personnes au bon poste, ça permet de construire quelque chose. Puis, une fois qu’on a fini, on débriefe. »
Ce sentiment d’appartenance, ainsi que le fait de travailler avec des personnes qui tirent dans le même sens, le ramènent à sa vie d’avant.
Oui, Tait est un leader qui travail « dans l’ombre » comme il aime le rappeler. Mais il est également quelqu’un de rassurant. Malgré cela, alors que la foule s’apprête à débarquer en plein milieu du désert, il avoue avoir l’impression d’être un canard qui devient fou dans sa mare. « Mais il n’y a personne pour le voir, donc tout va bien. »
Tait le minutieux semble donc être l’exact opposé du festival si coloré et si joyeux qui bat en plein Dubaï quand le HSBC SVNS y pose ses valises. Mais, pendant que des milliers de fans danseront en tribune, il faudra bien quelqu’un pour s’assurer que tout tourne correctement.
Quand on lui demande s’il existe un endroit où il aimerait déplacer cette étape, il répond sans réfléchir, le sourire aux lèvres : « Leicester ! »
C’est certain que la ville où il a passé autant d’années adorerait l’accueillir. Mais il est chez lui, à Dubaï, et il est la preuve vivante que l’on peut aimer profondément l’essence du rugby et tout en cherchant à en casser les codes.